(Le Matin)
Il faut sortir des combats à la marge pour aller à l’essentiel et rétablir la confiance. On ne peut plus être dans une logique d’énergie cinétique, il faut canaliser les initiatives, donner de la cohérence à l’action publique, redonner de la confiance, en un mot relancer la machine. Nous avons la volonté et les moyens de le faire et travailler ensemble. Le chef du gouvernement est prêt à aller de l’avant, en rassemblant les initiatives pour aller ensemble vers l’objectif qui a été fixé. C’est vrai, le Maroc traverse un cap difficile dans un environnement international et régional en crise, mais il a une fenêtre d’opportunité unique. Les institutions internationales comme le FMI et la Banque mondiale sont confiants en la capacité du Maroc pour constituer un modèle pour la région».
C’est en substance le plaidoyer du ministre de l’Économie et des finances, Nizar Baraka, qui interviendra à la Chambre des conseillers après avoir présenté sa stratégie devant la commission des finances du Parlement. Il décryptera la logique de politique de croissance, d’efficience et de rationalisation dans laquelle il entend s’inscrire, précisant au passage que la crise n’est pas un problème de liquidité, puisque Bank Al Maghreb qui est prêt à prendre une partie du risque avec les banques pour les PMI donne la liquidité. Il reste que pour éviter tout choc exogène, le Maroc met tout son poids politique pour mobiliser l’aide extérieure, celle des pays du Golf et des organisations internationales.
C’est ainsi qu’il a décidé de faire appel à une ligne instaurée par le Fonds monétaire international en novembre 2011, sous le nom de Ligne de précaution et de liquidité du FMI, la LPL. Cette ligne permet de tirer en DTS (droits de tirage spéciaux) en cas de choc majeur, jusqu’à hauteur de 700% de nos dotations au niveau du FMI qui serait l’équivalent de 6,2 milliards de dollars en deux ans avec trois ans de période de grâce et deux ans pour rembourser. Le taux d’intérêt est entre 3,7 et 4,2% donc en dessous de la levée que nous avions faite qui était à 4,5 %. Cette sorte de «garantie de caisse» octroyée aux seuls pays qui ont des fondamentaux sains, a beaucoup d’avantages, apporte de la liquidité mobilisable de suite en cas de besoin, permet de sauvegarder la solidité des indicateurs macro-économiques, facilite l’accès au marché financier international en donnant un effet signal aux investisseurs. Il reste que la LPL n’est qu’un des moyens et qu’elle ne suffit pas pour la compétitivité.
Que faire cependant pour relancer la machine ?
Un comité de compétitivité a été créé avec la CGEM, il travaillera sur le volet export. L’idée est de prendre tous les plans sectoriels mis en place, voir les blocages et dysfonctionnements, voir comment on peut accélérer ces plans, voir les marges de manœuvre en termes d’exportation dans les domaines de l’offshoring, de l’automobile, etc. Nous sommes, précise le ministre, dans une logique de contractualisation entre les différents acteurs qui font partie du comité de compétitivité. La diversification des marchés est aujourd’hui incontournable, le Maroc met le cap sur l’Afrique et les pays arabes. Un groupe est créé pour travailler sur l’Afrique où nous avons une bonne connaissance des marchés et où nos entreprises et banques sont déjà installées. L’Accord de libre-échange pourrait du reste être élargi à la Libye et la Mauritanie dans le cadre de l’accord d’Agadir. Il faudra travailler sur les critères d’attractivité pour pousser les fournisseurs étrangers européens, chinois, à venir s’installer au Maroc. Une commission interministérielle suivie sur les investissements conventionnés a été créée et présidée par le ministre qui rappelle que plus de 30 milliards de dirhams de projets conventionnés n’ont pas été réalisés. Il faut donc impérativement remettre à plat le système pour réduire les dysfonctionnements et résoudre les problèmes. Même politique volontaire d’accompagnement des PME qui doit être soutenue par les banques.
Une batterie de mesures, des comités de compétitivité et de suivi, une ligne de précaution et de liquidité du FMI, sorte de «garantie de caisse» qui permettrait un financement mobilisable immédiatement en cas de besoin, beaucoup d’ingrédients de réussite sont réunis pour traverser les quelques mois difficiles et préparer 2014, présentée comme l’année de décollage. Reste un point nodal : «Pour faire une bonne partition, les musiciens ne doivent pas jouer fort, mais doivent jouer juste». Pour le moment, c’est une impression de cacophonie qui se dégage et sans doute faudra-t-il que le chef d’orchestre reprenne sa baguette pour mettre au sein de l’équipe plus d’harmonie, gage de réussite, d’une année qui s’annonce très difficile.
(Lire également : Nizar Baraka dresse l’état des lieux de l’économie nationale)
Publié le : 5 Août 2012 – Farida Moha, LE MATIN